Tenants et aboutissants « inattendus » des affrontements armés israélo-palestiniens
Il y a quasi un mois, jour pour jour, Human Rights Watch publiait un rapport et une vidéo s’intitulant « A Threshold Crossed » (« Un seuil franchi »). Par ce biais, l’ONG dénonçait les crimes contre l’humanité d’apartheid et de persécution, commis à l’encontre de la population palestinienne. Depuis, la situation s’est envenimée et a conduit aux affrontements auxquels nous avons tous pu assister ces dernières semaines. Après la signature d’un cessez-le-feu ce 21 mai dernier, l’heure est au bilan mais aussi à l’analyse. Les tenants et les aboutissements des récentes violences semblent bien plus nombreux qu’il n’y parait.
Pour la Palestine, tout d’abord. Il faut garder à l’esprit que ces évènements surviennent après l’annulation des élections législatives par Mahmoud Abbas : le spectre de la division interpalestinienne planait alors (Voir l’article de Nicolas Dot-Pouillard).
Désormais, fort de son combat pour Jérusalem, le Hamas revendique le leadership national palestinien (Voir l’article de Khaled al-Hroub). En effet, les Palestiniens en colère et opprimés n’avaient pas le moindre espoir d’obtenir une aide quelconque d’une Autorité palestinienne paralysée sur le plan politique. Ils ont donc fait appel au Hamas.
Qu’adviendra-t-il de la politique palestinienne ? Nul ne le sait aujourd’hui. Cependant, l’atmosphère est toujours à la lutte et on peut déjà lire (Voir l’analyse d’ entre les lignes entre les mots):
« Toute action militaire s’est complètement arrêtée, mais l’Intifada (litt: soulèvement) continue »
Pour Israël, la question est tout aussi politique. « En Israël, il faut toujours un ennemi pour constituer un gouvernement » titrait l’Orient XXI (Voir l’article de Sylvain Cypel) : également en période post-électorale, cela fait bientôt deux mois que l’État hébreux ne dispose pas d’un gouvernement. L’actuel premier ministre Benyamin Nétanyahou a été incapable de constituer une coalition gouvernementale depuis les élections du 23 mars.
Or aujourd’hui, il retrouve des couleurs… Chaque fois que disparait le sentiment d’insécurité, les divisions internes reprennent le dessus ; chaque fois qu’il resurgit, l’unité nationale se reforme au profit de la frange la plus belliqueuse.
Et pour leurs voisins, comme le Liban ? Là aussi, certains partis politiques sortent renforcés de ces affrontements (Voir l’article de Paul Khalifeh). Même s’il n’a pas directement participé au dernier conflit qui a opposé la résistance palestinienne à Israël, le Hezbollah libanais en récoltes les dividendes politiques sur le plan stratégique.
Walid Charara, éditorialiste à Al-Akhbar, faisait remarquer:
« Ce conflit a renforcé la position de ceux qui, au Liban, ont toujours défendu l’idée que le pays du Cèdre avait besoin de capacités de dissuasion contre les velléités d’agression d’Israël et que [… le Hezbollah] a pu se procurer des capacités balistiques, les développer et les moderniser »
En conclusion, on constate que pour comprendre « le seuil franchi » de Human Rights Watch, il faut indéniablement s’intéresser au calendrier politique des différents protagonistes ainsi qu’aux tractations internationales qu’ils entraînent.
Comme nous le disions plus haut, l’heure est au bilan, à l’analyse et la politique ne justifiera pas tout : le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a d’ores et déjà annoncé sa volonté de créer d’une commission d’enquête internationale sur les atteintes aux droits humains dans les territoires palestiniens occupés et en Israël (Voir l’article d’Arab News et le résultat du vote de cette résolution). Même aux États-Unis, allié indéfectible d’Israël, les lignes semblent bouger. Et des membres du congrès de déclarer (Voir l’article de Ali Harb) :
« Les Palestiniens de Gaza vivent dans une prison en plein air sous blocus aérien, terrestre et maritime avec un accès très restreint à l’eau, à la nourriture, à l’électricité et aux soins de santé. Israël continue d’étendre les colonies illégales en Cisjordanie. Il ne s’agit pas seulement de la dernière semaine, mais de décennies d’atteintes aux droits de l’homme. »
En vrac, dans le reste du monde arabe …
Algérie : répression de la contestation populaire avant les élections législatives (Voir l’article de Jean-Pierre Sereni)
Maroc : entre fausse crise migratoire, vraie crise diplomatique (Voir l’article de Malek Bachir)
Soudan : « Liberté, paix, justice », la transition politique après la révolution de 2018 (Voir l’article de Gwenaëlle Lenoir)
Syrie : « À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire » ou la nième victoire électorale de Bachar Al-Assad (Voir l’article de Philippe Droz-Vincent)
Tunisie: La « criminalisation » de la normalisation ou les manifestations contre les relations avec Israël (Voir les articles de Ahlem Mimouna et de Hatem Nafti)