Opposition, economy and sun !
Egypte, entre contestation et problèmes sociétaux au pays des pharaons
L’Égypte, un pays dont on parlait moins ces derniers temps. Or, si le pays n’a pas échappé au printemps arabe, les questions politiques et sociales sont loin d’être réglées 10 après.
D’un point de vue économique, le régime du président Abdel Fattah Al-Sissi s’est vu accorder plusieurs prêts ces derniers mois, par les institutions financières. Les réformes peinent cependant à voir le jour et la reprise du tourisme reste timide, ce qui fait craindre à la population une période d’austérité (Voir l’article de Jean-Pierre Sereni). En effet, la dette de l’État représenterait 92,9 % du PIB en 2021, selon le FMI, soit un accroissement de 35 milliards de dollars (28,69 milliards d’euros) par rapport à 2019, avant la pandémie de Covid-19 …
D’un point de vue sociétal, la situation ne semble pas bien meilleure : l’opposition au président, à son régime et à leurs décisions peu progressistes, est toujours aussi forte ! Citons pour exemple, le combat des égyptiennes pour geler un projet de loi du gouvernement, visant restreindre les droits des femmes en permettant aux pères (ou aux frères) d’annuler le mariage des femmes de leur famille, ou même de nier aux mères le droit de déclarer leur enfant à la naissance (Voir l’article de l’AFP).
Si l’opposition est forte, la répression l’est malheureusement aussi ! Au moins 92 opposants au président Al-Sissi ont été exécutés depuis 2013 et des condamnations à mort ont été prononcées contre 64 autres personnes qui pourraient être exécutées à tout moment. En 2020, le nombre de ces exécutions a triplé, faisant de l’Égypte le triste troisième pays « le plus prolifique » après la Chine et l’Iran… (Voir l’article de Noor El-Terk).
Le dernier exemple en date est sans doute celui de Mohamed el-Beltagy (ancien député) et de onze autres opposants au gouvernement. Ces derniers sont sur la sellette et leurs familles vivent dans l’angoisse de la décision prochaine du président … Cette vie de « proches de prisonniers », c’est aussi celle de la famille Seif, opposants de génération en génération (Voir l’article de Martin Roux) : ils racontent aujourd’hui leur militantisme au journal l’Orient XXI et livrent un état des lieux glaçant de l’univers carcéral égyptien…
Liban, quand le carburant vient à manquer, comme tout le reste …
Le slogan « Opposition, economy and sun » convient également au pays du Cèdre, qui – en plus d’avoir connu de nombreux mouvements de contestation populaire – subit aujourd’hui une crise économique sans précédent. La Banque du Liban restreint le nombre de produits qu’elle subventionne, entraînant pénuries quotidiennes, contrebande et instabilité politique (Voir l’article de Muriel Rozelier). L’une des plus récentes est celle du carburant : les prix des carburants ont augmenté cette semaine de plus de 30%, les 20 litres d’essence 98 octanes passant de 16 300 livres (9.1 euro) à 63 000 livres (35.5 euros) (Voir l’article de l’AFP).
Résultat ? D’interminables files aux stations services et même des émeutes. L’armée libanaise a dû être déployée dans les rues de Tripoli, au nord du Liban, pour tenter de contenir les manifestants prenant d’assaut les demeures d’un certain nombre de politiciens (Voir l’article de Najia Houssari).
La tension est telle dans le pays que l’on voit apparaître des dérives, comme l’arrestation de journalistes étrangers : Matt Kynaston, reporter britannique, aurait été détenu au sud du Liban par des hommes affirmant être des membres du Hezbollah, alors qu’il couvrait la crise de carburant… (Voir l’article d’Arab News)
« Dans la rue, ils se livrent à l’expression de leur souffrance. Quant à la classe moyenne, dont les moyens de subsistance s’amenuisent, elle cherche des solutions de rechange, comme l’immigration ou d’autres alternatives locales. Les gens (…) veulent faire chuter les responsables (de la situation actuelle) et leur demander des comptes »
Déclaration de Maher Abou Chakra, leader de la branche politique dans l’organisation Lihaqqi (litt: Pour mes droits)
Des comptes, la population entend bien en obtenir de la part des responsables de l’explosion du port de Beyrouth ! Près d’un an après la catastrophe, une autre explosion défraye cependant la chronique : celle du bureau de Me El-Hachem, l’avocat des personnes arrêtées dans le cadre du dossier du port de la capitale (Voir l’article de Najia Houssari)… Hasard ?
Palestine, mourir pour des idées
Toujours en matière d’opposition, on constate que la Palestine ne fait pas exception : cette semaine, la presse annonçait que Nizar Banat, détracteur de Mahmoud Abbas, était décédé après une descente d’agents de sécurité de l’Autorité palestinienne (AP) à son domicile (Voir l’article de Shatha Hammad). Cette « arrestation » correspondrait au renforcement par l’AP de sa répression sécuritaire contre ses opposants et les influenceurs politiques en Cisjordanie occupée.
Le mandat du président palestinien Mahmoud Abbas était censé se terminer en 2009, mais suite à la scission entre le Fatah en Cisjordanie et le Hamas à Gaza, aucune élection nationale n’a été organisée depuis 2005… Malgré les derniers sondages indiquant que 64 % des personnes interrogées sont en faveur de sa démission (Voir l’article d’Entres les lignes entre les mots), l’homme est toujours au pouvoir. Plus grave encore, sa législature semble de plus en plus marquée par la répression : arrestations d’opposants politique, tortures, non-respect de la liberté d’expression, … (Voir l’article de Jacob Burns)
En vrac dans le monde arabe…
Irak : Visite guidée parmi les différentes minorités irakiennes, grâce à une synthèse de l’Orient XXI (Voir l’article de Gabrielle Colchen, Marta Moreno Guerrero & Rodrigo Sedano).
Koweït : On l’avait évoqué au détour d’une revue de presse, les femmes koweïtiennes ne veulent plus se taire face au harcèlement sexuel. Retour sur le mouvement « lan asket » (trad : « Je ne me tairai pas ») qui prend toujours plus d’ampleur (Voir l’article de Justine Clément).
Pays du Golfe : Quand perturbations météorologiques et tempêtes de sables, mettent en déroute les troupes américaines stationnées dans la région (Voir l’article de Bruce Stanley).
Yémen : Dans notre dernière dépêche, nous vous informions sur la crise de l’eau dans certains pays arabes. Entre dérèglements climatiques, politique agricole des grands propriétaires et précarité de la population yéménite, découvrez cette fois comment les ressources en eau se tarissent dans un pays ravagé par une guerre depuis six ans (Voir l’article d’Helen Lackner). Dans un registre plus positif, faites connaissance avec le passé linguistique du Yémen préislamique (Voir l’article de Chris den Hond) :